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Racisme et environnement

Nous sommes en plein coeur d’une pandémie. Et pourtant, la priorité du gouvernement canadien reste la même : le capital. Un exemple? La construction du gazoduc Coastal GasLink. En plus de cette pandémie, l’humanité entière se révolte contre la brutalité policière à la suite de la mort de George Floyd. Ces deux luttes bien distinctes sont pourtant plus liées qu’on peut le croire. En fait, dans les deux cas, la vie de personnes de couleur ou autochtone est menacée. Et ce n’est pas un hasard. Le système capitaliste et la suprématie blanche permettent ces injustices qui tachent notre histoire collective. C’est pourquoi je trouve plus que pertinent d’aborder la lutte antiraciste et son rapport avec la lutte environnementale.


Parlons tout d’abord du mouvement #Blacklivesmatter. Bien plus qu’une mode mal utilisée par plusieurs pour instrumentaliser une cause plus grande que soi, le mouvement Black lives matter a été créé par Patrice Cullors en 2013 pour commenter un billet de son amie qui traitait de la mort de Treyvon Martin. Dans un élan de solidarité, la communauté afro-américaine s’est mobilisée pour rendre justice à ce jeune homme noir. Le mouvement #Blacklivesmatter se veut inclusif et respectueux. Il vise à redonner du pouvoir aux voix qui ont été tues trop longtemps. Non, il ne vise pas à enlever des droits aux personnes qui ne sont pas noires. On parle de droits et de justice, pas de pointes de tartes. Ce n’est pas parce que ton voisin a enfin plus de respect et est considéré comme ton égal que tes droits à toi vont diminuer. C’est drôle cette phobie du mouvement #Blacklivesmatter… un peu comme si les gens qui détestent le mouvement avaient peur de se faire traiter comme les Noirs se font traiter depuis plus de 400 ans…

Bon, outre certaines revendications de base que le mouvement promeut comme arrêter de tuer des Noirs et favoriser notre place dans des positions de pouvoir, on ne parle que très peu d’une autre forme de racisme qui est lui aussi institutionnalisé : le racisme environnemental.

Selon Ingrid Waldron, autrice de « There’s Something in the Water: Environmental Racism in Indigenous and Black Communities », le racisme environnemental se définit par la localisation disproportionnée d’industries polluantes dans les communautés racisées, autochtones et à faible revenu.

Waldron relate la lutte de la communauté Pictou qui s’étale sur plusieurs décennies afin de faire fermer l’industrie de pâtes et papier Northern Pulp, en Nouvelle-Écosse. Au départ, en 1967, le gouvernement provincial cherchait à installer une nouvelle industrie et l’estuaire Boat Harbour s’avérait être l’endroit approprié pour construire une manufacture polluante. La Nouvelle-Écosse et la compagnie étaient évidemment au courant que l’estuaire était un endroit important pour la communauté. En fait, les autochtones y chassaient, y pêchaient et s’en servaient comme lieu récréatif. Le chef héréditaire de l’époque était inquiet de la venue de l’industrie. Après que la compagnie lui a menti sur les conséquences de l’usine, il consent à sa construction. Cela ne prend même pas quelques semaines pour que tous les poissons de l’estuaire meurent. On dit à leur nation que le problème se règlera de lui-même, alors on tarde à réagir. Mais la communauté Pictou n’est pas dupe. Elle est ébranlée et elle s’engage dans une lutte sans nom afin de faire fermer l’industrie. Le Boat Harbour Act de 2015 est un résultat de ce combat.

Un autre fait intéressant sur le racisme environnemental mentionné par Ingrid Wadron est le fait que les communautés visées par le racisme environnemental sont aussi celles qui manquent de moyens économiques et politiques pour se battre contre les industries polluantes. Preuve à l’appui : ce n’est que cette année, en 2020, que l’industrie a finalement fermé boutique… après 53 ans de combat. L’affaire avec cette injustice, c’est qu’elle a pris la vie de plusieurs personnes en les tuant à petit feu. Cancers, maladies cardiaques, maladies respiratoires... il y avait du choix.

Ce cas de racisme environnemental n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de la discrimination que les personnes noires et autochtones subissent depuis trop longtemps. Dois-je aussi rappeler que de violer des traités est l’insulte à l’injure que les gouvernements se permettent dans des cas comme celui-ci ou encore quand ils construisent des pipelines sur les territoires autochtones? Sans penser que cette attitude raciste s’inscrit dans notre histoire coloniale qui elle, n’avantage jamais les personnes racisées… mais ça, c’est une autre histoire.

Au Québec et au Canada, le racisme environnemental se manifeste par une négligence des communautés autochtones et racisées. Je vous explique.

En été 2019, un article du Devoir intitulé « Nos écoles ont du plomb dans l’eau » faisait la lumière sur un problème inquiétant pour les jeunes. En fait, le taux de plomb dans l’eau de certaines écoles était trop élevé et cela aurait pu entraîner des risques pour la santé des jeunes. On s’indignait de la situation, avec raison. Parallèlement, Radio-Canada nous apprenait l’automne dernier que 56 communautés autochtones n’avaient toujours pas accès à l’eau potable.

Est-ce que nous pourrions accepter de ne pas avoir d’eau potable dans nos maisons?

Alors pourquoi cette situation est-elle acceptable, ou du moins tolérée lorsqu’elle touche les Autochtones? Pourquoi laissons-nous une partie de notre population aux prises avec des problèmes de contamination d’eau, mais trouvons inacceptable un taux anormal de plomb dans d’autres écoles?

C’est aussi ça le racisme : un traitement différencié dans la société qui fait en sorte qu’on accorde moins de valeur aux vies et à la santé des personnes noires et autochtones. Et ce traitement différencié se fait sentir dans tous les domaines, l’environnement ne fait pas exception.

Le manque de considération pour les personnes racisées perpétue l’idée que nous sommes remplaçables : une communauté de plus ou de moins, ça change quoi au final? On en vient parfois à normaliser ce traitement inhumain à un point tel qu’on peut penser qu’il n’y a que les communautés marginalisées qui peuvent endurer de tels traitements. Alors forcément, il n’y a que dans ces communautés où l’on peut mettre des industries polluantes, au risque de mettre leur santé, leur sécurité et leur intégrité en péril. Après tout, l’argent mène le monde et le monde tourne autour des Blancs.


Pourquoi s’étonner?

 

Marie-Clarisse Berger

Étudiante & Militante 

1 commentaire

  • Tellement bien écrit et pertinent! Merci pour ce travail rigoureux et bien vulgarisé.

    Noémie

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